Le pianiste Guillaume Bellom joue Sonate pour piano n°17 en ré mineur op. 31 n°2 "La Tempête", composée en 1802 par Beethoven.
Alors que les opus 2 et 10 s’ouvraient avec une sonate en mineur, Beethoven place la sonate dans ce mode au centre de l’opus 31. Les premières lignes de la n° 17 sortent de l’ordinaire : si l’arpège égrené au tout début laisse croire à une introduction lente, un thème agité et haletant met aussitôt fin à cette rêverie. Cette trépidation est à son tour interrompue par un fragment de récitatif, puis par un arpège similaire au premier. Ce n’est qu’après ce second Largo que la « tempête » commence véritablement, surnom dont Beethoven serait responsable. En effet, il aurait répondu aux interrogations de son ami Anton Schindler, dérouté par la rhétorique de l’œuvre : « Lisez La Tempête de Shakespeare ! » Mais le déferlement météorologique semble bien le seul point commun entre sa musique et la pièce du dramaturge anglais.
L’arpège du Largo sert en outre de marquage formel, car il reparaît au début du développement, puis avant la réexposition. Lors de sa dernière occurrence, il s’accompagne de phrases de récitatif beaucoup plus développées, qui retardent le retour du thème principal. Fébrile, le mouvement évolue entièrement dans le mode mineur. Beethoven varie les sonorités et les textures en plaçant parfois les deux mains dans l’aigu, dans le grave, ou en les écartant de façon à laisser un large vide entre les deux.
Ce travail sur le timbre se poursuit dans l’Adagio au noble cantabile. On remarquera en particulier l’utilisation d’un bref motif qui évoque un sombre roulement de timbales, avant d’être utilisé dans l’aigu.
L’Allegretto adopte une écriture continue fréquente à l’époque baroque, abandonnée par les musiciens classiques et que le romantisme remettra au goût du jour. Toutefois, quelques éléments thématiques se détachent sur ce fond agité, en particulier le motif tournoyant exposé par la main droite dès le début du mouvement ou, plus loin, la mélodie heurtée du deuxième thème. Au départ houleux mais fluide, le flot de doubles croches devient fracas. Entièrement en mineur, comme le premier mouvement, le finale se termine sur un dessin d’arpège fuyant dans le grave, comme si la quête n’avait pas encore atteint son objectif. On pense alors à ce que Beethoven aurait déclaré à cette époque à son ami Wenzel Krumpholz (des propos rapportés par Carl Czerny) : « Je ne suis guère content de ce que j’ai écrit jusqu’à présent. À partir de maintenant, je veux ouvrir un nouveau chemin. »