Le bassin méditerranéen est en surchauffe. Dans la région, le réchauffement climatique est plus fort que la moyenne planétaire, et il pleuvra de moins en moins en été. Les sécheresses et les canicules vont donc continuer à se prolonger et à s’intensifier, avec un impact significatif sur les ressources en eau, l'agriculture, la biodiversité et les écosystèmes de la région.
La véritable spécificité se trouve finalement dans la mer elle-même. Elle se réchauffe presque aussi vite que le globe – environ +1,5°C en moyenne –, alors que la température de l’océan global s’est élevée à de 0,6°C depuis un siècle. En cause : sa physionomie particulière. Les fleuves qui s’y jettent ne sont pas très nombreux et n’apportent pas assez d’eau au regard de l’évaporation qu’elle subit. Par ailleurs, elle n’est en contact avec l’océan qu’à travers le détroit de Gibraltar, qui n’est pas assez profond pour permettre un brassage optimal.
Ces modifications du climat méditerranéen auront des implications majeures pour les équilibres des écosystèmes naturels. Sur terre, les espèces qui le peuvent vont devoir migrer pour s’adapter aux nouvelles conditions. Les hivers plus chauds entraîneront potentiellement des gelées tardives. Des décalages vont se produire entre les cycles phénologiques de la végétation et des pollinisateurs. Et les parasites pourraient voir leur aire de répartition s'élargir.
S’agissant des écosystèmes marins, l’augmentation rapide de la température de l’eau met en péril la biodiversité. L'acidification empêche certains organismes de former leur squelette.
Et les pollutions engendrées par les activités humaines ajoutent leur lot de complications.
Et notre espèce, dans tout ça ? Elle est loin d’être épargnée par les conséquences du réchauffement dans le bassin méditerranéen. Les feux de forêts menacent, et promettent d'accroître leur fréquence, leur durée, et leur intensité. De plus, les millions d’habitations qui bordent la mer sont particulièrement exposées à la montée des eaux. Sans compter toutes les menaces que font planer les sécheresses agronomiques et hydrologiques.
Alors, pour mieux comprendre les facteurs à l’origine de cette spécificité régionale en matière de climat, évaluer les conséquence d’un réchauffement accéléré sur les écosystèmes naturels et les sociétés humaines qui y vivent, et obtenir quelques pistes de réflexion pour atténuer le changement et s’y adapter, nous avons interroger le climatologue Joël Guiot, directeur de recherche au CNRS (CEREGE, Aix Marseille Université), qui a notamment participé à la rédaction du rapport spécial du Giec consacré au réchauffement planétaire à 1,5°C.