Sous la direction de Cristian Macelaru, l'Orchestre national de France joue les Danses symphoniques de Rachmaninov. Extrait du concert donné le 10 mars 2022 à l'auditorium de la Maison de la Radio et de la Musique.
Structure
Non allegro
Andante con moto. Tempo di Valse
Lento assai - Allegro vivace - Lento assai. Come prima - Allegro vivace
Rachmaninov, perçu comme l’un des derniers grands pianistes de l’ère postromantique, et l’œuvre qu’il écrivit pour son instrument de prédilection, font parfois oublier l’immense symphoniste (sans négliger la musique vocale ou de chambre) que fut ce compositeur russe exilé aux États-Unis. Contrairement à Prokofiev (qui eut bien des raisons de le regretter), jamais il ne revint dans sa patrie et mourut en Californie. À la jonction de ces deux domaines, le concerto pour piano (et pour aucun autre instrument) : Rachmaninov en composa quatre, prolongés par la célèbre Rhapsodie sur un thème de Paganini (1934). Pour orchestre seul, il laisse trois Symphonies (les deux premières composées en Russie, en 1895 et 1907, la dernière en Amérique, en 1936) ; des poèmes symphoniques : Prince Rostislav (1891), Le Rocher (1893), Caprice bohémien (1894) ou, beaucoup plus célèbre, L’Île des morts (Dresde, 1909), œuvre fascinante d’après le tableau du peintre suisse Arnold Böcklin, mais aussi Les Cloches, œuvre singulière et magnifique, avec chœur et solistes (1913), enfin ces Danses symphoniques : son testament musical qui, à l’instar de la Troisième Symphonie, somptueuse, laisse libre cours à la nostalgie de la patrie perdue.
L’intense activité de Rachmaninov concertiste limitait le temps disponible pour la composition, six œuvres majeures seulement ayant pu voir le jour dans ses dernières années, souvent accueillies par des critiques acerbes, comme ce fut le cas pour cet Opus 45. Disparu à peine deux ans après la création, le compositeur ne put malheureusement goûter la célébrité et le succès aujourd’hui attachés à cette partition d’envergure.
Selon le chorégraphe russe Kasyan Goleizovsky, diverses sections des Danses symphoniques résultent d’un projet de ballet resté inachevé, Les Scythes (1915, soit à la même époque exactement que la Suite scythe de Prokofiev). Si une telle réutilisation n’était pas inédite, la manière magistrale dont le matériau est présenté est toutefois résolument en phase avec son temps, ainsi sur le plan du rythme qui, par moments, fait penser au jazz. Composée concomitamment, la transcription pour deux pianos fut publiée en 1942, complétant d’une certaine manière ses Suites pour deux pianos n° 1 op. 5 (Fantaisie-Tableaux, 1893) et surtout n° 2 op. 17 (1901, qui se referme sur une irrésistible et vertigineuse Tarantella-Presto) : on sait que le compositeur et le jeune Vladimir Horowitz jouèrent ensemble la transcription de l’Opus 45 en août 1942 à Beverly Hills, les deux émigrés s’étant établis en Californie.
À lire aussi : Sergueï Rachmaninov : 10 (petites) choses que vous ne savez (peut-être) pas sur