Les adieux de Michel Sardou

2018-04-13 137

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Avant l'ultime concert de Michel Sardou, une petite musique, difficilement audible, parcourt la Seine musicale, la nouvelle salle de Boulogne-Billancourt (92). Il s'agit des chansons de Frank Sinatra. Les titres défilent et on songe que, en 1971, « The Voice » avait décidé, elle aussi, de se retirer du monde de la musique en donnant un ultime concert au Ahmanson Theatre de Los Angeles. Quarante-six ans plus tard, Sardou arrive sur scène en chantant « Salut », manière de dire au public que l'aventure touche à sa fin.

À quoi pouvaient ressembler ces adieux ? Il faut dire que l'on était un peu inquiet. La tournée triomphale de neuf mois avait fatigué l'artiste. Son concert du 15 mars avait été difficile et ses ultimes représentations (initialement prévues les 23 et 24 mars derniers) avaient été reportées à cause d'une extinction de voix. Mais ce 12 avril, Sardou, costume noir et nœud papillon dénoué, était en forme. Très en forme. Une entrée maîtrisée sur « Salut » donc, puis une emballante « Java de Broadway », suivie de la poignante « Vladimir Ilitch », et voilà le chanteur de 71 ans lancé.

Jouant avec le public, mi-séducteur, mi-provocateur (« je suis un homme libre et je les emmerde »), Sardou se détend alors que défilent cinquante années de tubes : « Je vais t'aimer », « Le France », « La Fille aux yeux clairs », le triptyque très réussi « En chantant »-« Les Bals populaires »-« Le Rire du sergent », « La Maladie d'amour », « Il était là », « Je vole », « Les Ricains » ou « Être une femme » (« qui m'a valu tant d'emmerdes de la part des mouvements féministes [...] qui ne comprennent rien »). Sardou arrive même à placer deux chansons de son nouvel album Le Choix du fou (« San Lorenzo », qui parle du pape, et « Le Figurant »). Le public est ravi.
« Vous voyez bien qu'il faut que j'arrête »

Sardou sourit, esquisse quelques pas de danse, fait lever un public varié – contrairement à l'idée reçue – sur « Afrique adieu » ou « Musulmanes ». Dans un concert ultra-classique et très bien huilé (mis à part quelques erreurs dans les paroles), on regrettera le manque de surprises pour un adieu. Certes, à la fin de « La Dernière Danse », les spectateurs ont levé des feuilles où était inscrit « Michel, on t'aime » en chantant « Je t'aime, je t'aime, je t'aime, oh oui, je t'aime » (chanson de 1971) comme un cadeau d'au revoir. Mais du côté de l'artiste, on s'en tiendra au plan. La fin du concert sera la même que celle des précédents : un rappel sur les éternels et indémodables « Lacs du Connemara » et un départ sous les acclamations (plus longues qu'à l'accoutumée).