Zappa, un guitar-héros (5/5 Zappa 20 ans après, France Culture)

2016-09-10 92

L'Effet Zappa : pour une contre-histoire de la culture américaine, et autres...

5) La traversée du manche : Zappa, un guitar-héros.

Les rapports de Zappa avec le le jazz et les jazzmen en finale à votre zapparade estivale. Contrairement à un vil bruit, Zappa ne s'est jamais défié du jazz, l'a pratiqué sur scène où il a convié bien des jazzmen importants, d'Archie Shepp aux frères Brecker, en passant par Ponty, Duke. L'improvisation ayant toujours eu sa place dans l'écriture zappaienne et ses applications scéniques. Nous évoquerons, en premier chef, les quatre figures-clé du jazz selon Zappa : Eric Dolphy, Charlie Mingus, Roland Kirk et Cecil Taylor. Zappa, guitariste phare, mais non au sens des exhibitions des guitar-heroes. Marqué tant par les guitaristes de RnB que par Wes Montgomery, ami d'Hendrix et de Clapton avec il fit scène commune à NY, Zappa fut un guitariste en perpétuelle réinvention, attentif à toutes les formes techniques (il est un des pionniers de la pédale wah-wah) et d'écriture ; on sent même chez lui une influence secrète de la musique moyen-orientale.

Disques :
- Eric Dolphy - Out to lunch
- Eric dolphy memorial barbecue ("Weasels ripped my flesh")
- Charlie Mingus (anthologie Frémeaux)
- Cecil Taylor - Coltrane time
- Roland Kirk - From Bechet, Byas and Fats (album "Rip, rigs and pigs")
- FZ - Let's move to Cleveland solos (avec Archie Shepp)
- FZ - Zappa in New York
- Wes Motgomery - Airegin
- Albert Collins - Ice pick
- FZ - Willie the pimp ("Hot rats")
- FZ - Transylvania boogie ("Chunga's revenge")
- Hendrix ("Purple haze")
- FZ - Inca roads ("One size fits all")
- FZ - Watermelon in eastern hay ("Joe's garage")

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Emission par François Angelier, diffusée en août 2013 sur France culture.

Samedi 4 décembre 1993 !
Jour de tristesse pour tout ce que la terre compte d'aspirateurs, de moustaches, de caniches et de sofas. Frank Zappa quitte la scène, vaincu par un cancer dont il n'aura pu faire ni une composition pour percussion, ni un accessoire de scène, pas même une figure de son pandémonium gothique.MAIS, comme l'écrivait son maître Edgard Varèse, "Present day composer refuses to die", "le compositeur d'aujourd'hui dit non à la mort". ALORS, pas mort Zappa ! s'en fout la mort Zappa ! Zappa résiste ! preuve en est : tous ses albums ou presque viennent de réapparaître dans les bacs. Il est bien normal que pour le vingtième anniversaire de sa transmutation en esprit des airs et de sa fusion dans la "grande note" cosmique, France-Culture s'offre une escapade zappaienne au sein des mille et une formes que prirent, de 1953 (date de sa première "hiérophanie" musicale) à 1993, son monde poétique, sa vision politique et, avant tout, son univers de compositeur.Mais quel Zappa ? L'hydre a plusieurs têtes et le dieu mille mains et tous seront évoqués : le fomantateur du groupe Mothers of invention (version freak et free-rock de l'actionnisme dada), le dansant disciple de Varèse, Stravinsky et Webern (qui paracheva son parcours de compositeur du XXe par une collaboration avec Boulez et une histoire d'amour avec les virtuoses allemands de Ensemble modern), le militant politique qui, de batteur d'un petit combo multiracial à témoin de choix auditionné par le Sénat américain, n'eut de cesse de malmener le conservatisme WASP et la bien-pensance yankee, politicarde et télévangélique ; le metteur de pieds fétides dans tous les plats tristes et soupes figées de l'Amérique blanche (et à ce titre pornographe jovial, profanateur enjoué et blasphémateur en roue libre) et surtout l'infatigable démiurge d'un monde où Dracula et Bartok, Bugs bunny et Stockhausen, Phil Spector et Yves Tanguy cessent ENFIN d'être perçu contradictoirement.