Ferguson : l'Amérique face à ses vieux démons

2014-08-19 9

Les dernières grosses émeutes raciales aux Etats-Unis remontent à 2010. La nuit de la Saint-Sylvestre 2009, Oscar Grant, un jeune garçon boucher est abattu d’une balle dans le dos par un policier qui dira avoir confondu son arme et son taser. A l’annonce du verdict – 2 ans de prison – jugé trop clément, des heurts explosent. Encore une bavure de la police contre un noir…

L’histoire des Etats-Unis en est jalonnée. Jalonnée d‘émeutes raciales. De colère des noirs contre la suprématie blanche.

85 ans de ségrégation, et plus de 10 ans de combat pour son abolition sous l‘égide de Martin Luther King aboutissent à la grande marche pour les droits civiques de 1963. Moins d’un an plus tard, Martin Luther King est au premier plan lorsque le président Johnson signe le Civil rights Act, et déclare illégale la discrimination reposant sur la race, la couleur, la religion, le sexe, ou l’origine nationale.

Les problèmes ne sont pas réglés pour autant. Les discriminations persistent, surtout en milieu urbain. Les années 60 connaîtront de nombreuses émeutes. Parfois meurtrières, Watts en 65, Detroit en 67, puis 1968, après l’assassinat de Martin Luther King. Bilan, des dizaines de morts, des milliers d’arrestations.

Les années 70 et 80 seront un peu plus calmes.

Mais la colère ressurgit de plus belle avec l’affaire Rodney King en 1992. Un an plus tôt, King est rattrapé par une voiture de police après une course poursuite pour excès de vitesse. Son passage à tabac est filmé et fera le tour du monde. 1 minute 20 de violence et un acquittement pour les policiers en avril 92 par un jury de 10 blancs, entraînant un déchaînement de violences.

Et puis en 2008, 45 ans après le fameux “I have a dream” de Luther King, l’impensable se produit. Les Etats-Unis élisent un président noir. De cette nuit historique naissent les immenses espoirs de cette communauté qui se sent toujours discriminée.

Mais si l’Amérique a élu Obama, elle n’a pas changé pour autant. En 2012, le sort de Trayvon Martin vient le rappeller cruellement. Ce jeune homme de 17 ans est abattu par un agent de sécurité latino-américain qui l’avait trouvé suspect.

Le seul cas vraiment sur lequel Obama s’est jamais exprimé, il évoque alors la possibilité d’un crime raciste, avec ces mots “Mon fils aurait ressemblé à Trayvon Martin”. Sinon, le président s’est bien gardé d’intervenir sur ce terrain miné.

Pendant ce temps, chaque affaire, et les émeutes qu’elles soulèvent, éclairent un peu plus une génération qui ne croit plus aux discours, et qui subit la crise économique de plein fouet.